Vous avez surement entendu parlé de LinkY, le compteur communiquant savamment baptisé « boitier intelligent » par ses pères chez ERDF, la filiale d’EDF chargée de la distribution du courant en France.
Le principe : un compteur électrique censé remplacer le parc d’appareils bêtes et méchants qui équipent pour le moment la plupart de nos habitations alimentées par l’opérateur historique. Son intelligence, il la tient de sa capacité à indiquer en temps réel la consommation d’énergie d’un foyer, permettant aux utilisateurs de contrôler au Watt près leur dépenses d’énergie domestique et ainsi, de se responsabiliser sur les économies d’énergie, et de se voir offrir -à plus ou moins moindre coût- l’occasion d’en faire… enfin !
Et toi, citoyen irresponsable, n’as tu rien compris ?
Le ministre de l’industrie, Eric Besson, annonçait fin octobre que le dispositif serait lancé sur l’ensemble du territoire entre 2014 et 2020. Et d’ajouter : « ce nouveau compteur va faciliter la vie des français et leur permettre d’être acteurs de leur consommation. »
A l’origine, une directive européenne pleine de bon sens qui demande aux Etats membres de l’Union d’appliquer un cadre de promotion de l’efficacité énergétique. Le but : atteindre l’objectif de 9% en matière d’économie d’énergie d’ici 20016.
Au final : après des années passées à démocratiser le réflexe écolo d’économiser l’énergie à la maison, chez les particuliers, incitant à remplacer ses ampoules par des basses consommation, de ne pas laisser la télé allumée si on ne la regarde pas, de ne pas ouvrir la fenêtre si le chauffage fonctionne, à maîtriser l’éclairage des pièces d’une maison, d’investir dans un filtre réducteur du débit de la chasse d’eau, etc, etc… Est ce nécessaire de faire passer ce message disant que les utilisateurs ont besoin d’être responsabilisés et aidés dans cette tache –à laquelle ils sont sensibilisés par leur propre environnement, leur entourage, dans la vie de tous les jours et depuis longtemps, en équipant leur foyer d’un boitier, à l’intelligence supérieure, qui traîne pourtant son lot de casseroles avant même son lancement officiel ?
Suite page 2 !
Chronique d’une débâcle annoncée :
Testé en 2010 en Indre et Loire et dans la ville de Lyon, chez plusieurs centaines de millier d’utilisateurs (300 000 sur Tours et Lyon, d’après le communiqué d’ERDF daté du 8 juin 2010), le boitier communiquant devait permettre aux utilisateurs de réaliser 10 à 15% d’économie d’énergie par an.
Seulement voilà : les résultat des tests sont mitigés, la communication autour du projet laisse à désirer, et une véritable fronde se met en place pour contrer l’opération.
Collectivités locales, utilisateurs, union de consommateurs, dénoncent un appareil peut efficace…
« Un succès » selon Eric Besson, après les résultats des expérimentations en Indre et Loire et à Lyon en 2010. Jean Luc Dupont, président du Syndicat intercommunal d’énergie d’Indre et Loire, livre… un contrepoint intéressant : « pour 90 % des consommateurs, l’arrivée de Linky n’a rien modifié dans leurs pratiques » (résultats d’une étude réalisée sur 150 collectivités et 1500 foyers). La plupart du temps, le compteur Linky a été placé à l’extérieur du domicile, dans la cave d’un immeuble, à l’entrée d’un lotissement ou sur le palier d’un appartement… ce qui brise un peu dans l’oeuf le coté « disponibilité immédiate de l’info » pour l’utilisateur à « aider ». Même lorsque le compteur est installé au coeur du domicile, les résultats qu’il fournit ne sont pas qualitativement viable au sein de la problématique annoncée : ils proposent un relevé quotidien, qui ne permet donc pas d’avoir accès à une consultation en temps réel, ou simplement par tranche horaire, matin, midi, après midi, soir… ce qui était pourtant l’objectif.
…à tendance liberticide :
La CNIL (Commission Nationale Informatique et Liberté), s’inquiète du fait que « la mise en place de ces compteurs intelligents impliquera la collecte d’informations détaillées sur notre consommation électrique, ce qui pose des problèmes de respect de la vie privée« . « les informations de consommation d’énergie transmises par les compteurs sont très détaillées et permettent de savoir beaucoup de choses sur les occupants d’une habitation » Des informations consultables à distance sur la consommation des ménages, pire, sur leurs habitudes de vie : heure à laquelle la cafetière est mise en marche le matin, présence dans le logement, heures d’entrées et de sorties…
Les turpitudes du TURPE :
Tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité. C’est la source de revenu principal du gestionnaire de réseau d’électricité, à hauteur de 90%, peut-on lire sur le site d’ERDF.
Le risque est là, selon les associations de défense des consommateurs : qu’ERDF répercute l’investissement relatif à la mise en place des boîtiers sur une augmentation du TURPE, à hauteur d‘un ou deux euros par mois sur la facture de l’utilisateur.
Suite et fin, page 3 !
A qui profite Linky ?
Le coût de l’équipement de 35 millions de foyers est estimé à 4,3 milliards d’€. Pas de surcoût pour les utilisateurs selon le gouvernement, EDF estime que l’investissement sera rentabilisé par l’arrêt du déplacement de ses agents pour inspecter les compteurs. Des emplois en moins ?
D’autres pays sont équipés de boîtiers communiquants, comme l’Italie par exemple, où le coût du boîtier atteint 80€. ERDF annonce 120€ pour le sien, plus exactement une fourchette de 120 à 240€, len 2010. M.Proglio, le 9 novembre 2011, parle de 200 à 300€. Pourquoi une telle fluctuation dans les annonces ?
Pour résumer l’imbroglio de Monsieur Proglio : il a annoncé etre prêt à « donner » le boitier aux utilisateurs du réseau, et à investir les fonds nécessaires, mais à la condition qu’il devienne propriétaire des boîtiers et qu’il bénéficie d’un retour sur investissement. Ors, ce sont les collectivités locales qui possèdent et gèrent habituellement les compteurs, les systèmes de comptage, et l’ouvrage du réseau de distribution. ERDF est concessionnaire. ERDF est juridiquement indépendant d’EDF et distribue l’énergie pour EDF, POWEO ou Direct energie… M.Proglio est PDG… d’EDF. CQFD ?
Aucune étude n’a été lancée avant ou après la phase de test, sur les effets éventuels sur la santé des rayonnements électromagnétiques de Linky. Pour rendre un compteur communiquant comment faire ? Le site contaminations chimiques.info (site citoyen d’information) annonce que l’usage du CPL, un signal radiatif est nécessaire à l’opération. Et que même sous les limites autorisées, le rayonnement n’est pas sans conséquences. Il conclut en indiquant que les normes sur la pollution environnementale décrétées il y a plus de 20 ans et régissant encore aujourd’hui la mise en place de ces technologies sont obsolètes.
Note positive :
Tout de même, tirer sur l’ambulance n’est pas forcément le but de cet article. Il est vrai que pour le moment, Linky se traine une image mitigée. Cependant, le principe, d’un point de vue pratique envers l’utilisateur, a quelque chose de très intéressant.
Pouvoir bénéficier d’un rapport en temps réel de sa consommation d’électricité à domicile, et parvenir à moduler ainsi son activité énergétique est une avancée technologique, un service qui devrait simplement être proposé aux utilisateurs. Cependant la communication autour de son lancement laisse à désirer, elle laisse surtout quelques zones d’ombre… traçabilité des infos, efficacité réelle, fonctions intégrées au boitier, gestion du projet, etc.
Et vous, avez vous fait partie du panel de testeurs à Lyon ou Tours ?
Qu’en pensez vous ?
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